SEANCE PLENIERE DU CONSEIL GENERAL DE CORREZE- DISCOURS DE FRANçOIS BRETIN

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SEANCE PLENIERE DU CONSEIL GENERAL DE CORREZE- DISCOURS DE FRANçOIS BRETIN

DISCOURS DE FRANçOIS BRETIN
GROUPE CORRÈZE TERRE DE GAUCHE
SÉANCE PLÉNIÈRE DU CONSEIL GÉNÉRAL - 15 NOVEMBRE 2013


Monsieur le Président,
Chers collègues,


Nous sommes rassemblés pour répondre à cette question : oui ou non devons-nous accepter la subvention de fonctionnement de plus de 12M€ qui pourrait être accordée à notre département en échange de la signature d’une convention nous engageant gravement pour les années à venir ?
Je ne m’attarderai pas sur les conseils de bonne gestion que s’autorise à prodiguer notre opposition du haut de son inconséquence. Il ne s’agit là que de la sempiternelle péroraison de pompiers pyromanes criant « au feu ! ».
Ce fonds de soutien exceptionnel, inférieur de près d’1M€ à celui de 2011 n’est pas une faveur faite à la Corrèze. C’est un dû. Comme l’a dit Gérard Bonnet, les compensations que l’État doit verser aux départements n’ont jamais suivi, depuis leur création, la progression exponentielle des allocations de solidarité, allocations qui devraient relever de la solidarité nationale et sont mises à la charge de collectivités locales privées par ailleurs de toute liberté fiscale. Le déséquilibre s’établit donc à près de 33M€ pour la seule année 2012. Ce sera probablement encore plus pour 2013 et l’on n’ose pas calculer le montant des spoliations cumulées depuis plus de 10 ans.
Ce fonds de soutien exceptionnel est un dû mais, en payant sa dette, l’État a pris l’habitude de nous faire croire qu’il nous fait des cadeaux. Ces faux cadeaux sont empoisonnés ! La convention précédente, il y a 2 ans, a déjà pesé lourdement, tant sur notre liberté de manœuvre que sur les choix difficiles et les décisions douloureuses qu’elle nous a contraint à prendre « en contrepartie ».
Si la situation hors du commun de la Corrèze doit beaucoup à sa dette vraiment extra-ordinaire, celle-ci n’est pas la seule cause des énormes difficultés que nous connaissons pour boucler notre budget. Sans avoir emprunté au même niveau que nous, beaucoup d’autres départements connaissent des problèmes comparables. Et si les collectivités locales étaient moins maltraitées, nous pourrions espérer sortir assez vite de difficultés momentanées. En fait depuis bien longtemps nous semblons assister impuissants à l’effeuillage d’une éphéméride retraçant la chronique d’une mort annoncée : celles des collectivités locales et particulièrement celle des départements.
Naguère, nous avons cru pouvoir pousser une sorte de chansonnette sur l’air de la Carmagnole :
Monsieur Sarko avait promis (bis)
D’égorger les départements (bis)
Mais le coup a manqué !
Grâce à nos députés....
Sauf que... Sauf que rien n’a changé sur le fond. Si, à la satisfaction générale, les conseils généraux malmenés ont échappé au couperet et à la mort par égorgement, c’est aujourd’hui à l’étouffement et à la mort par étranglement qu’ils sont condamnés.
Les gouvernements changent, mais les ministres émanant des choix démocratiques s’en remettent aux mêmes technocrates de la finance internationale, chantres de la concurrence entre territoires, ennemis communs de la réalité rurale et de celle des banlieues. Sans ambition d’égalité ou de développement équilibré, les solidarités nationales s’amenuisent. Les territoires finiront par se côtoyer sans esprit de partage, et l’on assistera alors au choc des pôles ruraux et des pôles urbains.
Oui, sous le diktat des marchés financiers et des recommandations libérales que l’administration européenne et ministérielle nous impose, les départements et les communes sont en danger. Nombreux sont aujourd’hui les maires et les conseillers généraux désabusés qui se demandent quelle sera à l’avenir leur réelle utilité. Les collectivités ont été jusqu’à présent les moteurs essentiels du développement économique, des investissements publics, de l’action sociale, de la préservation de tous les services de proximité. Leur appauvrissement prive les élus locaux des moyens indispensables à la satisfaction des besoins des populations.
L’austérité n’est pas le seul facteur d’amoindrissement de la démocratie de proximité. La réforme territoriale entreprise éloigne les électeurs de leurs représentants et met à mal la cellule de base de la démocratie, celle des villages et des petites villes. Les collectivités locales sont conduites, non à coopérer, mais à fusionner où à être absorbées dans des structures dont elles ne veulent pas. L’exemple en est donné par le projet du Grand Marseille, que 90% des 130 communes concernées refusent, grandes ou petites, d’Aubagne à Aix, de la Droite à la Gauche. Il en est de même sur Paris.
La réforme du scrutin départemental est un autre exemple. Partout, le bouleversement que constituent tant le scrutin bâtard et bicéphale que le redécoupage de nouvelles circonscriptions électorales vont tenir de la quadrature du cercle. Cette « farfeluterie » née de gens à l’imagination féconde va se traduire immanquablement par un désintérêt de plus en plus grand de l’électorat. La politique n’avait pas besoin de cela.
Pourtant, si de cette chronique d’une mort annoncée, nous connaissons le début et le présent, la fin n’est pas encore écrite. Elle n’est pas une fatalité absolue. Il est possible d’en briser la chaîne. Mais avant, pour le moment, il nous faut faire avec les moyens du bord. Le fonds de soutien va nous permettre in extremis de boucler le budget à quelques euros près du budget primitif.
La gestion rigoureuse et austère de notre Président aura permis de faire face à quelques mauvaises surprises survenues en cours d’exercice. Je pense particulièrement à la question des AMP de nos maisons de retraite, sur lesquels l’État n’a tenu qu’à moitié ses promesses. Pourtant, malgré les cris d’alarme inutiles de quelques oiseaux de malheur, aucun de ces postes n’a été remis en question, et le budget départemental, conformément aux promesses faites, a totalement pris en charge les financements non assurés par l’ARS.
Rigueur et austérité vont se poursuivre. En attendant les jours meilleurs qu’on nous laisse entrevoir, nous allons contraints et forcés, sans trop d’illusions et sans fierté, accepter cette convention et autoriser le Président à la signer.

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